J’ai faim. Comment ne plus avoir faim tout le temps? Est-ce anormal d’avoir faim comme j’ai faim, à ce point? D’où ça me vient?
J’ai déjà tenté d’exprimer différemment mes envies, mes urgences. Par exemple, écrire pour faire passer la sensation du ventre qui tiraille, sous la graisse, sous les organes, encore bien plus profond que ça, dans le fin fond de l’univers, je sens qu’il y a toujours, à jamais, ce trou à combler, ce vide à remplir.
Quand la nourriture passe par ma gorge, lubrifiée par ma salive, caressée par mes papilles, engloutie… L’espace d’un instant, de quelques mètres d’intestins, je crois, j’y crois. J’y crois à chaque fois, que c’est la dernière fois que j’y crois car tout va se résoudre après cette gorgée de pain, de viande, de pâte.
Le cerveau est immédiatement récompensé, il sursaute, ça y est ! C’est là ! C’est ça ! C’est exactement ça qu’il nous fallait ! Et c’est lors de cet infime moment, minitésimal honnêtement, que l’explosion se forme, que la création prend tout son sens, que le grand infini s’agite et se rétracte quasi immédiatement. Encore! Crie-t-il, encore! We want more!
Ce n’est jamais assez pour l’infini. Rien n’est jamais suffisamment rassasié, saturé, satisfait.
Il reste.
Toujours.
Ce petit point vide vers lequel tout converge et rien ne revient jamais.
Un jour il m’avalera toute crue. Abysse goulue.
Et avalée, je resterai.
Tout ce qu’il demeurera à aspirer ne persistera plus longtemps après moi. Et après eux encore, des myriades de festins morts.